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Carburants marins :
qu’est-ce que le mazout lourd?

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Les efforts pour réduire les émissions provenant des navires – notamment, le resserrement des règles concernant la teneur en soufre permise dans le carburant marin – limitent l’utilisation du mazout lourd dans l’industrie du transport maritime.

Jusqu’à récemment, la plupart des navires de haute mer utilisaient du mazout lourd pour alimenter leurs moteurs. Ce carburant était si populaire qu’il représentait 86% du carburant marin utilisé à l’échelle mondiale, d’après la troisième étude sur les gaz à effet de serre réalisée par l’Organisation maritime internationale (OMI). Depuis le milieu du 19e siècle, le mazout lourd constituait un choix logique puisque son contenu énergétique très élevé permettait aux navires de parcourir une grande distance en brûlant peu de carburant.

Ce carburant était également peu coûteux : le mazout lourd coûte moins cher que les autres carburants marins, car il est un produit résiduel issu du processus de raffinage du pétrole. Lors de ce processus, d’autres types de carburant sont extraits, notamment l’essence et le diésel – appelés distillats – qui sont utilisés dans les voitures, les camions, les avions et les navires de plus petites tailles. Ces extractions laissent derrière le mazout lourd, un sous-produit du raffinage du pétrole brut.

Pourquoi appelle-t-on le carburant marin du combustible de soute?

Le terme « combustible de soute » remonte à l’époque des navires à vapeur, lorsque le charbon utilisé pour alimenter les moteurs à vapeur était stocké dans des soutes à charbon et pelleté à bord. De nos jours, le terme « soute » désigne les carburants marins liquides et « souter » signifie faire le plein de carburant marin, c’est-à-dire recevoir, à bord, le combustible nécessaire pour alimenter le moteur du navire.

Le mazout lourd et la teneur en soufre

Contrairement à d’autres carburants, le mazout lourd est dense et doit être chauffé pour pouvoir circuler librement dans les moteurs des navires. Malheureusement, les résidus qui composent le mazout lourd contiennent de nombreuses impuretés, y compris du soufre. Le soufre contenu dans le carburant permet de lubrifier le moteur, mais une fois brûlé, il devient un polluant atmosphérique appelé oxyde de soufre ou SOx – un des contaminants qui résulte d’une combustion incomplète. Bien que l’industrie du transport maritime ne soit pas la seule source de ces émissions, il est estimé qu’elle contribue à 13 % des émissions d’oxyde de soufre à l’échelle mondiale. Les polluants atmosphériques provenant des navires peuvent être très nocifs pour la santé et l’environnement.

L’OMI travaille en collaboration avec l’industrie du transport maritime pour mettre en place des mesures pour réduire la pollution causée par les oxydes de soufre. La mesure la plus importante ayant été prise à ce jour est l’OMI 2020. Entrée en vigueur en janvier 2020, cette règle limite à 0,5 % la teneur en soufre permise dans le carburant marin.

À quoi servent les systèmes d’épuration des gaz d’échappement (épurateurs)?

Afin de respecter la limite de teneur en soufre de 0,5 % imposée par l’OMI 2020, les navires peuvent brûler du mazout lourd à faible teneur en soufre ou le remplacer par un gas-oil marin à faible teneur en soufre ou par du gaz naturel liquéfié. Les navires peuvent également continuer à utiliser du mazout lourd s’ils sont équipés d’un système d’épuration des gaz d’échappement pour épurer – d’où le terme épurateur – l’excès de soufre présent dans le tuyau d’échappement avant qu’il ne soit libéré dans l’atmosphère.

Bien que les épurateurs soient approuvés par l’OMI comme un moyen de se conformer à la règle et qu’ils doivent rencontrer des normes internationales, ils font tout de même l’objet d’une controverse en raison des résidus qu’ils produisent et des possibles impacts que pourraient avoir ces derniers sur la santé des océans. Clear Seas étudie actuellement l’incidence environnementale des épurateurs et son rapport sur le sujet sera publié en 2020.

Le carbone noir et les changements climatiques

La combustion incomplète du mazout lourd produit un autre polluant, la suie noire, appelée matière particulaire. Certaines suies sont appelées carbone noir; lorsqu’en suspension dans l’air, ces particules absorbent la lumière du soleil et noircissent la glace et la neige lorsqu’elles tombent au sol. Elles contribuent donc au réchauffement climatique en diminuant la quantité d’énergie solaire reflétée dans l’espace (l’effet albédo) et en accélérant la fonte des glaces dans les régions polaires.

La plupart du carbone noir provient de sources naturelles comme les feux de forêt et les volcans actifs, mais aussi de sources humaines, comme les émissions produites par les véhicules et les industries. Il est estimé que le carbone noir est un des principaux contributeurs au réchauffement climatique avec les émissions de dioxyde de carbone.

L’interdiction de l’utilisation du mazout lourd dans l’Arctique

En raison de la disponibilité croissante de carburants marins alternatifs et de la fonte des glaces qui ouvre de nouvelles routes de navigation dans l’Arctique, les pressions se font de plus en plus fortes afin d’interdire l’utilisation du mazout lourd dans cet écosystème fragile et éloigné. Si un déversement de mazout lourd se produisait dans l’Arctique, il pourrait être ardu à nettoyer en raison de la nature du pétrole et du manque d’infrastructures et de ressources d’intervention dans cette région. Le mazout lourd est interdit dans l’Antarctique depuis 2011.

Interdir l’utilisation du mazout lourd dans l’Arctique réduirait les risques de dommages à l’environnement causés par le carbone noir produit par la combustion du mazout lourd et éliminerait les risques de déversements. Toutefois, les bénéfices environnementaux associés à une telle interdiction doivent être évalués en fonction des incidences socio-économiques potentielles que cet interdit pourrait avoir dans les collectivités arctiques qui reçoivent leurs denrées essentielles par navire.

Une interdiction de transporter et d’utiliser du mazout lourd comme carburant dans l’Arctique à compter du 1er juillet 2024 a été proposée à l’OMI. Si approuvée, son processus d’entrée en vigueur commencera à la fin de 2020. Le gouvernement du Canada, après avoir mené des consultations auprès des collectivités nordiques et effectué une étude d’impact, appuie cette interdiction.

Les navires continueront-ils à utiliser du mazout lourd dans le futur?

Le mazout lourd est le principal carburant utilisé par l’industrie du transport maritime depuis le milieu du 19e siècle, mais cela est en train de changer en raison des règles plus strictes concernant la teneur en soufre permise dans le carburant marin. Les producteurs de carburant trouvent des façons de réduire la teneur en soufre du mazout lourd en le mélangeant à des distillats à faible teneur en soufre ou en éliminant le soufre durant le processus de raffinage.

Le secteur de la production et de l’approvisionnement de carburants marins est complexe et changeant, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19 et du ralentissement économique qui lui est associé. L’utilisation du mazout lourd ne devrait pas disparaître complètement, particulièrement pour les navires dotés d’épurateurs. Toutefois, les épurateurs ne sont peut-être pas une solution de rechange intéressante si le prix des carburants à très faible teneur en soufre continue de diminuer, car le mazout lourd perdrait son avantage financier.

Par ailleurs, les efforts déployés par l’OMI et l’industrie du transport maritime pour réduire les émissions de gaz à effet de serre à 50 % des niveaux de 2008 d’ici 2050 renforceront les pressions en faveur de l’utilisation de carburants marins à plus faible teneur en carbone. L’industrie examine d’autres options telles que les piles à combustible, les batteries de même que l’énergie solaire et éolienne, comme sources d’énergie uniques ou combinées à d’autres systèmes.

En tant que centre de recherche qui supporte une industrie du transport maritime plus durable, Clear Seas mène des recherches dans ce secteur en pleine évolution, notamment une analyse complète de la littérature portant sur l’incidence de divers carburants marins sur les changements climatiques. Cliquez ici pour en savoir plus.

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