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Entretenir les connaissances : le parcours de Gavin Woodburn avec les jardins de palourdes Kwiakah

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Dans cet article, nous nous penchons sur le projet novateur de Gavin Woodburn, dont le travail avec la Première Nation Kwiakah redéfinit la recherche scientifique.

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Gavin est membre de la Première nation Kwiakah, située à l’extérieur de Campbell River, sur l’île de Vancouver, en Colombie-Britannique. Il a obtenu un baccalauréat en géosciences à l’Université Carleton et prépare actuellement un doctorat à l’Université de Calgary. Il a travaillé à Pêches et Océans Canada (MPO), à Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) dans la Division des sciences autochtones et a récemment participé au programme de stage autochtone de Clear Seas. Dans le cadre de son stage à Clear Seas, Gavin a étudié les Loxiwe (jardins de palourdes) et leur rôle en tant que technologie autochtone et source d’alimentation durable pour le peuple Kwiakah. Au cours de ce projet, Gavin a travaillé aux côtés de sa famille et de sa communauté pour en apprendre davantage sur les pratiques de gestion des ressources marines, grâce à des approches scientifiques à la fois occidentales et autochtones.

Gavin Woodburn

Peux-tu nous parler de ton projet de recherche sur les jardins de palourdes ?

Ce projet sur les Loxiwe est abordé avec triple perspective, c’est-à-dire avec le prisme de la science autochtone, de la science occidentale et de l’environnement, ce qui signifie que nos connaissances et notre approche sont basées sur ce que l’environnement nous dit et que nos méthodes sont créées pour nous aider à l’écouter. Cela implique l’utilisation de protocoles importants tels que ceux décrits dans les principes de propriété, de contrôle, d’accès et de possession (PCAP) et le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause (CPLCC), ainsi que la mise sur un pied d’égalité de la science autochtone et de la science occidentale.

Les méthodes utilisées ont donc consisté à interroger les Aînés et les gardiens du savoir, à cartographier la zone intertidale, à étudier les jardins de palourdes et à utiliser d’autres méthodes d’observation pour mieux comprendre les Loxiwe. L’étape suivante consistait à s’assurer que les connaissances acquises étaient ouvertes et accessibles. Nous avons donc demandé à un vidéaste de filmer les recherches et de réaliser une vidéo, et à un graphiste de créer des images à partir des entretiens afin d’aider à partager le projet et à l’enseigner à d’autres personnes. J’ai également eu l’occasion de prendre la parole lors d’événements communautaires et je travaille actuellement à la publication d’un article universitaire évalué par des pairs.

Peux-tu nous parler du processus d’organisation d’un tel projet et de la logistique qu’il a impliquée ?

Ce projet a nécessité beaucoup de travail, mais il a commencé par le choix d’une idée qui m’était personnelle : les jardins de palourdes et les pêcheries dans ma nation. La première étape a consisté à parler à ma communauté pour m’assurer que j’avais la permission et le soutien nécessaires pour mener à bien ce projet, et pour confirmer que la communauté pourrait bénéficier de ce projet de recherche. Pendant cette période, j’ai été employée par la Division des sciences autochtones à ECCC.

Ils ont apporté leur soutien au projet et ont fourni un financement et un mentorat tout au long du travail sur le terrain et des processus de planification. J’ai ensuite élaboré un plan de recherche qui combinait des approches ancrées à la fois dans la science autochtone et dans la science occidentale. En ce qui concerne la science autochtone, l’une des parties les plus importantes du projet consistait à interroger les Aînés et les gardiens du savoir, car ce sont eux qui ont la connaissance la plus personnelle et la plus approfondie de la terre et de l’eau et qui comprennent comment les choses ont changé d’hier à aujourd’hui.

Le processus a consisté à contacter les gardiens du savoir de la nation Kwiakah, à obtenir des fonds pour leur verser des honoraires pour les entretiens, à trouver d’autres experts locaux dans ce domaine, ainsi que des guides pour nous emmener dans les jardins de palourdes. Des formulaires de consentement ont ensuite été créés pour les personnes avec lesquelles nous travaillions dans les différentes communautés. Ces formulaires sont très importants lorsque l’on travaille avec les communautés des Premières nations et les Aînés, car ils servent à reconnaître que les connaissances partagées sont les leurs et qu’elles n’appartiennent à personne d’autre.

Lorsque nous stockons les données, ils ont le droit de les retirer à tout moment, de choisir quelles informations sont partagées et de spécifier ce qui doit rester privé. Il a été précisé que le gouvernement, ou toute autre organisation externe, n’est pas propriétaire des connaissances et des données collectées dans le cadre de ce projet de recherche. En ce qui me concerne, le projet a nécessité beaucoup d’apprentissage en cours de route, mais en fin de compte, la partie la plus importante a été la communication avec les communautés des Premières nations.

Qu’est-ce qui t’a incité à en savoir plus sur les jardins de palourdes sur le territoire de ta nation ?

Au départ, la raison pour laquelle j’ai voulu travailler aux côtés de ma nation est que je n’ai pas grandi sur mon territoire. Ce projet m’a donné l’occasion d’en apprendre davantage sur le territoire de mes ancêtres, de comprendre ce qui se trouve sur notre terre, comment elle fonctionne, et d’établir des liens avec la communauté.

Plus j’en apprenais sur l’environnement et la géographie de ma nation, plus je remarquais la présence de jardins de palourdes et d’autres technologies autochtones dans la région.

L’apprentissage de l’histoire de mon peuple et des pratiques de gestion des terres m’a permis d’explorer la science et la recherche d’une manière différente. Il s’agissait non seulement d’apprendre à connaître ma culture en tant que Kwiakah, mais aussi d’apprendre à aborder et à comprendre la science d’un point de vue différent et d’une manière différente. Ce projet m’a donné l’occasion d’accomplir tout cela dans ma communauté.

Territoire Kwiakah

Quelles sont les principales conclusions de cette recherche ?

Ce qui ressort comme l’une des plus grandes découvertes de mon projet de recherche, c’est la création d’un processus unique et personnalisé sur la façon de réunir la science occidentale et la science autochtone dans le cadre d’un projet de recherche scientifique. D’autres chercheurs peuvent appliquer ce cadre à leur propre projet, en commençant le processus sur la base des principes de PCAP. Je pense que ce qui est unique dans mon projet, c’est l’approche de la recherche scientifique d’une manière inclusive, de sorte que différentes compréhensions du monde puissent être découvertes ensemble.

Site de recherche vu des airs

Quels sont les points forts du travail sur le terrain ?

L’un des points forts de ce projet de recherche a été pour moi la possibilité de côtoyer des personnes aussi enthousiastes que moi au sujet de la technologie autochtone. Des membres de ma famille sont venus participer, ce qui a permis d’établir un autre lien personnel avec le projet de jardin de palourdes.

D’autres partenaires de Clear Seas et du gouvernement fédéral se sont également joints à nous pour travailler sur le terrain. C’était amusant de réunir des gens, en particulier ceux qui n’auraient peut-être pas eu l’occasion de se rendre dans cette région reculée de la Colombie-Britannique pour étudier les bancs de palourdes et la technologie créée par la communauté qui y vit. Le fait d’inclure des partenaires passionnés comme ceux mentionnés ci-dessus a donné plus d’énergie à toute l’équipe chaque fois que nous étions sur la plage, que nous nous amusions et que nous apprenions des connaissances traditionnelles importantes.

L’un des points forts de ce projet a été de pouvoir explorer et découvrir mes passions avec d’autres personnes qui se nourrissaient de cette énergie.

Travail terrain

Comment se poursuit ta carrière de chercheur ?

La prochaine étape pour moi est de compléter mon doctorat à l’université de Calgary. Je vais faire partie d’un projet de recherche plus vaste auquel participent l’université Simon Fraser, l’université de Colombie-Britannique, l’université de Victoria et l’université de Calgary.

Ce projet se concentrera sur l’objectif global de la sylviculture régénérative et sur la manière dont nous pouvons prendre une forêt de deuxième génération coupée à blanc et lui redonner les caractéristiques d’une forêt ancienne. Mon rôle dans le projet de recherche sera de reconstruire les systèmes de connaissances de la Première nation Kwiakah, en particulier en ce qui concerne la gestion des terres. J’aurai l’occasion d’interagir avec les partenaires impliqués dans le projet et d’aider à la traduction de la science occidentale à la science autochtone. J’aurai également l’occasion de faire avancer mes propres recherches, notamment en examinant les dépôts de coquillages sur le territoire.

Les dépôts de coquillages sont essentiellement un endroit où l’on déverse tout ce qui provient des activités quotidiennes d’une communauté. On peut y voir des couches de coquillages, d’os d’animaux, de roches fissurées par le feu, de perles, de pointes de lances et d’autres matériaux utilisés quotidiennement, déposés en couches dans ces grands tas. J’aimerais explorer davantage cette composante écologique scientifique et historique de la région afin de mieux comprendre la relation du peuple Kwiakah avec la terre.

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