Résumé du nouveau guide d’investissement portuaire conçu pour aider les autorités portuaires à planifier et financer de manière stratégique des projets d’infrastructure dans un contexte d’augmentation du commerce mondial et de demande urgente de décarbonisation du transport maritime.
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Résumé
Il met en évidence le défi crucial que représente le financement de projets qui offrent des avantages sociétaux importants, comme les infrastructures d’énergie propre, mais qui ne génèrent pas nécessairement de retours commerciaux immédiats, obligeant les ports à obtenir des financements publics ou à recourir à des modèles de financement innovants. En analysant divers modèles de gouvernance et d’entreprise à travers le monde, la boîte à outils fournit un cadre structuré permettant d’aligner les décisions d’investissement à long terme sur les politiques nationales et les objectifs économiques, afin de garantir que les ports puissent passer efficacement du statut de portes d’entrée commerciales traditionnelles à celui de pôles énergétiques essentiels pour l’avenir.
Répondre aux nouvelles exigences en matière d’infrastructures maritimes
Alors que le secteur maritime mondial est soumis à une pression croissante en faveur de la décarbonation, les autorités portuaires doivent réfléchir non seulement à la manière de soutenir la croissance des volumes commerciaux, mais aussi à la manière de répondre à des exigences énergétiques et environnementales de plus en plus complexes. Un nouveau rapport commandé par Clear Seas et C40 Cities, intitulé « Augmenter les investissements dans les ports – Une boîte à outils pratique », fournit un plan d’action pour investir dans l’avenir des ports, à la fois en tant que portes d’entrée commerciales traditionnelles et en tant que pôles énergétiques essentiels pour la transition énergétique mondiale.
Le rapport aborde une préoccupation commune à de nombreuses autorités portuaires : comment structurer, financer et mettre en œuvre des projets d’infrastructure qui sont essentiels pour la résilience future, mais qui n’offrent pas nécessairement de retombées commerciales immédiates. S’appuyant sur un large éventail d’études de cas, d’entretiens et de recherches internationales, la boîte à outils propose un cadre qui aide les acteurs portuaires à prendre des décisions d’investissement éclairées, en particulier dans des domaines tels que les infrastructures d’énergie propre et le développement industriel.
L’une des principales observations du rapport est que, si les besoins d’investissement dans les ports sont croissants, le chemin pour obtenir ces investissements n’est pas toujours simple. Certains projets, tels que la modernisation des terminaux ou la location de terrains pour de nouvelles installations, peuvent générer des rendements commerciaux prévisibles et attirer des financements privés. D’autres, tels que les infrastructures d’énergie renouvelable ou les installations d’avitaillement à faibles émissions, peuvent apporter des avantages sociétaux importants, mais ont du mal à couvrir leurs coûts par le biais de redevances directes aux utilisateurs. Ce sont souvent ces projets qui nécessitent un financement public ou des modèles de financement innovants pour aller de l’avant.
Comprendre la complexité des investissements et des modèles de gouvernance
Selon le rapport, l’investissement total nécessaire pour soutenir les objectifs de décarbonisation de l’industrie maritime pourrait atteindre 2 000 milliards d’euros à l’échelle mondiale au cours de la prochaine décennie, les ports représentant une part importante de ce montant. Cela comprend non seulement la modernisation des infrastructures pour soutenir un transport maritime plus efficace, mais aussi les investissements dans la production de carburants propres, la production d’électricité, le stockage du carbone et les connexions logistiques multimodales.
Pour mieux comprendre ce défi, la boîte à outils présente une typologie des modèles de gouvernance et d’exploitation portuaire. Les organismes de gestion portuaire varient, allant d’entités publiques corporatisées jouissant d’une autonomie financière à des autorités publiques intégrées aux administrations municipales. Leurs modèles d’exploitation diffèrent également : certains fonctionnent selon un modèle foncier, louant des terrains et des infrastructures à des tiers, tandis que d’autres jouent un rôle plus actif dans les opérations et les investissements. Il est important de comprendre ces structures, car elles déterminent qui est responsable de quels types d’investissements et quels mécanismes de financement sont envisageables.
Le rapport souligne la nécessité de distinguer entre le « business case », qui tient compte du rendement commercial, et le « value case », qui inclut des avantages publics, environnementaux et sociétaux plus larges. Cette distinction est particulièrement pertinente lorsqu’il s’agit d’évaluer si un financement public ou un soutien politique est nécessaire. Certains projets peuvent récupérer leurs coûts grâce aux redevances d’utilisation ou aux baux. D’autres, tels que l’alimentation électrique à quai ou l’électrification des ports, peuvent nécessiter des subventions, des aides ou des obligations réglementaires pour être financièrement viables.
Exemples tirés de systèmes portuaires internationaux
Pour illustrer ces concepts, le rapport met en avant des études de cas provenant du monde entier. Aux Pays-Bas, le déploiement des infrastructures de branchement à quai a été soutenu par la réglementation européenne, des subventions nationales et la coopération entre les autorités portuaires et les fournisseurs d’électricité. Cette combinaison de financement et de soutien politique a permis aux ports d’aller de l’avant avec des projets présentant des avantages environnementaux, mais un rendement commercial limité.

L’Autorité maritime et portuaire de Singapour a mis en œuvre une stratégie à long terme exigeant que les navires de port fonctionnent à l’électricité ou à des carburants zéro émission d’ici 2030. Cette politique est soutenue par un plan national d’infrastructure, des programmes de financement et des normes techniques. Au Royaume-Uni, la simplification des processus d’autorisation et de développement a permis aux opérateurs portuaires privés de se développer avec moins d’obstacles réglementaires, ce qui a contribué à rationaliser les investissements dans de nouveaux terminaux.
Oman offre un autre exemple, utilisant ses ports comme plateformes pour les investissements directs étrangers. Ses grands complexes portuaires et industriels ont attiré plus de la moitié des investissements étrangers du pays au cours de la dernière décennie, en particulier dans des secteurs tels que la production d’énergie et l’industrie manufacturière. Ces exemples montrent comment l’alignement de la planification des infrastructures sur la politique nationale et les objectifs économiques peut contribuer à attirer des capitaux et à accélérer le développement.
Pertinence pour les ports canadiens et du Pacifique
La trousse d’outils tient également compte du contexte canadien. Bien que les administrations portuaires canadiennes soient financièrement autonomes et fonctionnent indépendamment des budgets gouvernementaux, elles sont souvent confrontées à des restrictions en raison de limites d’emprunt fixes et de processus d’approbation complexes. Ces limitations peuvent retarder les investissements, en particulier pour les projets liés à la transition énergétique, à l’accès ferroviaire et à l’adaptation au changement climatique. Le rapport suggère que la révision de ces cadres réglementaires pourrait aider les ports canadiens à investir plus rapidement et de manière plus stratégique.
Les récents investissements portuaires menés par des Autochtones, tels que le terminal fluvial entrepris par la Première Nation Millbrook et l’Administration portuaire d’Halifax, l’agrandissement du terminal maritime entrepris par la Première Nation Pabineau et le port de Belledune, et le parc logistique d’importation entrepris par la Première Nation Metlakatla et l’Administration portuaire de Prince Rupert, montrent comment la participation au capital et les nouveaux outils de financement peuvent aider les projets à avancer plus rapidement grâce au soutien de la communauté et à des autorisations plus souples. Des projets similaires soutenus par la Banque de l’infrastructure du Canada et les programmes de garantie de prêts aux Autochtones démontrent comment les partenariats autochtones accélèrent le développement des infrastructures de transport et de commerce à travers le pays.
Pour les ports de la région Pacifique, les conclusions de ce rapport tombent à point nommé. Beaucoup d’entre eux sont confrontés à des risques liés au climat, à des contraintes de capacité et à la nécessité de moderniser des infrastructures vieillissantes. Parallèlement, ils peuvent bénéficier d’une position unique pour servir de plaques tournantes pour la logistique régionale, la production de carburants verts et le développement de l’énergie offshore. La boîte à outils propose des conseils qui peuvent contribuer à la réalisation de ces objectifs, en particulier lorsque les investissements à long terme nécessitent une coordination entre les parties prenantes locales, les agences gouvernementales et les partenaires du secteur privé.
Renforcer la capacité d’investissement à travers les politiques et les opérations
Au-delà des stratégies de financement, le rapport met en évidence les pratiques opérationnelles internes susceptibles de renforcer la capacité d’un port à attirer et à gérer des capitaux. Il s’agit notamment de maintenir le contrôle des coûts, de développer des sources de revenus stables telles que les baux fonciers et de renforcer les capacités internes pour gérer des projets d’infrastructure complexes. Les ports qui disposent de revenus locatifs réguliers, par exemple, peuvent bénéficier d’une plus grande stabilité financière que ceux dont les revenus dépendent des fluctuations du volume de marchandises.
Le développement par étapes est une autre stratégie importante. En commençant par des phases plus petites et plus faciles à gérer, les ports peuvent s’adapter aux conditions du marché, réduire les risques et créer une dynamique favorable à des investissements plus importants. Le rapport souligne également l’importance d’harmoniser les politiques locales, nationales et internationales afin de créer un environnement plus prévisible pour les investissements. Des réglementations ou des règles de financement incohérentes peuvent compromettre des projets par ailleurs solides en introduisant une incertitude pour les investisseurs et les autorités publiques.
Une coordination efficace entre les différents niveaux de gouvernement est souvent essentielle. Que le projet implique l’OPS, le ravitaillement en hydrogène ou l’amélioration du transport ferroviaire intermodal, les ports doivent souvent collaborer avec les services publics, les agences de transport et les organismes de financement. La boîte à outils encourage les gouvernements à élaborer des cadres réglementaires cohérents et à adopter des processus transparents et compétitifs pour l’attribution des fonds publics.
Un cadre structuré et évolutif
La boîte à outils sur les investissements portuaires ne prescrit pas de solution unique. Elle offre plutôt un cadre structuré et adaptable qui aide les autorités portuaires et les décideurs politiques à évaluer les compromis, à identifier les opportunités et à relever les défis en matière de financement et de gouvernance. Il se veut une référence pratique, non seulement pour les grands ports nationaux, mais aussi pour les ports régionaux plus petits confrontés à des problèmes similaires à une échelle différente.

Alors que les ports s’adaptent à l’évolution des modèles commerciaux mondiaux, des réglementations environnementales et des systèmes énergétiques, une planification à long terme et une préparation à l’investissement sont de plus en plus essentielles. Ce rapport propose des outils et des stratégies qui peuvent aider les autorités portuaires à relever ces défis de manière systématique et à aligner la planification des investissements sur des objectifs politiques plus larges.
La boîte à outils complète sur les investissements portuaires, comprenant des études de cas détaillées, des évaluations des risques et des mécanismes de financement, est disponible dans la section recherche de notre site web. Elle est destinée aux autorités portuaires, aux agences gouvernementales, aux planificateurs et à toute autre personne impliquée dans le développement des infrastructures et des politiques maritimes.
À propos de l’autrice

Clara Kaufmann
Responsable de la recherche chez Clear Seas
Clara possède une formation pluridisciplinaire en géographie, en santé publique et en psychologie, ainsi qu’une vaste expérience de recherche et d’analyse de données. Clara contribue au programme de recherche de nombreuses façons, notamment en définissant et en dirigeant de nouveaux projets de recherche, en gérant un projet pluriannuel avec des partenaires universitaires, en réalisant des cartes SIG et en encadrant des équipes étudiantes de recherche dans le cadre du programme de stages pour les autochtones.
Clara est basée à Montréal et aime soutenir les activités de Clear Seas au Québec. Elle est titulaire d’un baccalauréat avec mention en psychologie et français de Bryn Mawr College et une maitrise en géographie de l’Université de McGill.