La propulsion alternative, y compris les remorqueurs électriques, réduit considérablement le bruit sous-marin.
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Les hélices sont le principal moyen de propulsion des navires, convertissant efficacement la puissance du moteur en poussée pour déplacer les navires sur l’eau. Les autres systèmes comprennent les jets d’eau, qui utilisent des courants d’eau à haute pression pour déplacer les navires à grande vitesse, les ventilateurs à propulsion d’air utilisés par les aéroglisseurs, et les voiles qui exploitent la puissance du vent. Le passage à des navires plus économes en énergie façonne également la prochaine génération de systèmes de propulsion, y compris les systèmes solaires et éoliens. Les autres systèmes de propulsion n’auront pas la même signature sonore que les systèmes à hélice.
Quantification de la réduction du bruit généré par des remorqueurs respectueux de l’environnement
Le passage des moteurs diesel à la propulsion électrique à batterie a permis de créer un remorqueur plus silencieux et plus propre. Ce changement de système de propulsion a également permis d’améliorer l’expérience (initialement étrange) de l’équipage : un remorqueur qui démarre et fonctionne sans bruit, sans vibrations et sans éructation de fumée. Le projet « Quantifying Underwater Noise Reductions from Environmentally Friendly Tugs » de Robert Allan Ltd, en partenariat avec HaiSea Marine et des chercheurs de l’Université de la Colombie-Britannique, s’est attaché à comprendre et à quantifier le bruit sous-marin généré par les remorqueurs électriques à batterie.1,2
Les tests effectués à l’aide d’hydrophones en 2023 ont montré que, sans surprise, les remorqueurs électriques sont beaucoup plus silencieux que leurs homologues à moteur diesel, la plupart du temps. Les tests avec les hydrophones ont comparé deux remorqueurs à moteur diesel aux HaiSea Wamis en mode batterie et en mode génératrice. En moyenne, les remorqueurs diesel étaient environ trois fois plus bruyants (environ 15 décibels) que le remorqueur électrique lorsqu’ils naviguaient à une vitesse comprise entre 5 et 8 nœuds. Lors des transits à 10 nœuds, le remorqueur électrique était environ deux fois moins bruyant que les remorqueurs diesel (une différence de 10 décibels en moyenne). Ces résultats concernant le bruit non lié à la cavitation ont attiré l’attention sur une lacune dans les connaissances : comment le bruit des machines à l’intérieur du navire se retrouve-t-il dans la colonne d’eau? Le retraçage du chemin du bruit s’effectue par une combinaison de mesures à bord et d’essais en mer, et par l’élaboration d’un modèle informatique pour suivre le bruit des machines jusqu’à l’eau.

Malheureusement, la cavitation de l’hélice n’est pas influencée par un changement de système de propulsion et restait un problème quand le remorqueur fonctionnait sous charge, comme c’est le cas lorsqu’il s’agit de tirer ou de pousser d’autres navires. Le niveau de bruit sous-marin généré par les deux types de remorqueurs fonctionnant à pleine puissance de remorquage était très similaire. Pour le remorqueur électrique fonctionnant en mode batterie, le bruit généré par l’activité de traction et de poussée à pleine puissance était environ six fois (30 décibels) plus fort que lorsque le remorqueur était en transit. La question de savoir si les hélices à pas variable peuvent être efficaces pour les opérations des remorqueurs est un domaine qui devra faire l’objet d’études futures. Les hélices des remorqueurs sont généralement à pas fixe afin de fournir une poussée maximale, mais une hélice à pas variable peut être réglée pour réduire la probabilité de cavitation pendant le transit.
Étant donné que les navires électriques à batterie produisent beaucoup moins d’émissions de gaz à effet de serre (GES) que les navires à propulsion diesel et qu’il est nécessaire de réduire rapidement les émissions de GES pour respecter les engagements nationaux et internationaux en matière de lutte contre les changements climatiques, les remorqueurs électriques sont susceptibles de devenir de plus en plus courants. Il devient donc de plus en plus important de pouvoir prédire les émissions sonores potentielles des remorqueurs électriques (et, en fait, des autres navires électriques) lors de la phase de conception du navire. C’est pourquoi Robert Allen Ltd. a également perfectionné un outil appelé TugEM (Tug Emissions) pour prédire le bruit généré par différents modèles de remorqueurs électriques. Le modèle est encore en cours d’élaboration, mais l’outil devrait permettre de tester les conceptions de navires en fonction de différents comportements opérationnels typiques des remorqueurs – par ex., la marche au ralenti, le transit, la poussée et la traction des navires, ainsi que l’aide à l’accostage et à l’appareillage des navires.
L’outil a besoin de plus de données pour être validé – et les concepteurs ont accès à un excellent ensemble de données grâce à ce projet de l’Initiative pour des navires silencieux. La vérification du profil sonore sous-marin d’un navire à l’aide d’hydrophones exige des efforts importants. Cet outil pourrait potentiellement être utilisé à l’avenir pour montrer à quel point une conception sera silencieuse, sans avoir à tester le remorqueur après sa construction.
Cages d’hélice : mise au point d’un dispositif de sécurité plus silencieux
Les petits bateaux de pêche, les navires de plaisance, y compris les bateaux de plongée, et les canots de sauvetage sont souvent équipés d’une cage d’hélice afin d’éloigner les câbles (ainsi que les personnes et la faune marine) des pales de l’hélice qui tournent rapidement. Ces cages, surtout si elles sont mal installées, peuvent toutefois présenter des inconvénients – p. ex., l’augmentation de la traînée et, par conséquent, du bruit du navire.

Quantification des effets du bruit rayonné sous-marin des cages d’hélice
Lloyd’s Register et Martec Limitée ont entrepris le projet « Quantifying Underwater Radiated Noise (URN) Effects of Propeller Cages », la première initiative visant à quantifier l’incidence des cages d’hélice sur le bruit rayonné sous-marin en utilisant une combinaison d’essais dans l’eau et de dynamique des fluides numérique pour examiner l’effet des cages. Les travaux ont révélé que si les navires équipés de cages d’hélice sont plus bruyants que leurs homologues sans cage, la principale source de cette augmentation du bruit n’était pas la cage comme telle, mais l’hélice.
Les navires équipés d’une cage d’hélice doivent fonctionner à un régime plus élevé pour maintenir la même vitesse que ceux qui n’en ont pas. L’augmentation de la vitesse s’accompagne d’une cavitation et, par conséquent, d’une augmentation du bruit.
Les cages touchées par l’encrassement biologique – algues et autres organismes marins qui y poussent – ont fait plus de bruit à faible vitesse que les cages propres. La raison en est simplement que les exploitants de navires dont les cages sont encrassées doivent augmenter encore leur vitesse pour compenser la traînée supplémentaire causée par ces organismes par rapport aux navires dont les cages sont propres.
Le projet est toujours en cours. Actuellement, l’équipe du projet travaille à la conception de cages d’hélice en utilisant la dynamique des fluides numérique pour mettre au point des cages qui offrent les avantages nécessaires en matière de sécurité tout en étant plus silencieuses et plus efficaces, puis en testant et en affinant les conceptions en utilisant des navires réels. Ce projet a commencé par examiner les cages d’hélice pour les langoustiers de type Cape-Island, d’une longueur d’environ 40 pieds, et veut maintenant se pencher sur des navires plus grands, comme les bateaux de relevé, avec des cages d’hélice intentionnellement conçues pour réduire le bruit sous-marin.
Cet article fait partie d’une série de cinq articles sur la technologie de détection et d’analyse du bruit sous-marin des navires.
Pour en savoir plus sur les nouvelles découvertes et les défis à relever pour rendre les navires plus silencieux, consultez les autres sujets de cette série ici.
L’Initiative pour des navires silencieux est financée par le gouvernement fédéral par l’intermédiaire de Transports Canada. Les partenaires industriels et les chercheurs intéressés par d’éventuelles collaborations en matière de recherche et de développement afin de faire progresser les solutions novatrices dans le domaine de la technologie marine sont invités à contacter l’équipe de l’Initiative pour des navires silencieux à l’adresse suivante : Marine-RDD-maritime@tc.gc.ca.
Image de couverture : TransOceanic Wind Transport
Encrassement biologique : Accumulation d’organismes vivants sur la coque et d’autres parties immergées d’un navire, qui entraîne une augmentation de la « traînée » ou de la friction lorsque le navire est en déplacement. Cette traînée augmente le bruit et diminue l’efficacité énergétique du navire.
Cavitation : La cavitation d’une hélice est un phénomène créé par des changements rapides de la pression de l’eau autour de l’hélice. Lorsqu’une hélice tourne, elle crée une zone de basse pression d’un côté de la pale et une zone de haute pression de l’autre. Quand l’hélice tourne rapidement ou que le navire et l’hélice sont soumis à une forte charge, la chute de pression rapide provoque l’évaporation de l’eau et la formation de bulles de vapeur qui se déplacent sur les pales. Lorsque les bulles atteignent la zone de haute pression, elles s’effondrent et produisent du bruit.
Dynamique des fluides numérique : La dynamique des fluides numérique est une méthode utilisée pour étudier le mouvement des fluides, comme l’eau et l’air. Elle consiste à utiliser des ordinateurs pour résoudre les équations mathématiques qui décrivent le mouvement des fluides. Grâce à la dynamique des fluides numérique, les ingénieurs et les chercheurs peuvent créer des simulations virtuelles pour voir comment les fluides s’écoulent autour d’objets, comme les navires, ou de composants particuliers, comme la coque ou l’hélice. Comprendre comment l’eau se déplace autour des navires et interagit avec eux permet aux concepteurs de voir où la traînée ou les turbulences peuvent se produire et de se concentrer sur l’optimisation de la conception du navire. Nous pouvons également utiliser la dynamique des fluides numérique pour créer des simulations de différents concepts. Nous pouvons ainsi tester et affiner les composants sans avoir à les construire physiquement, ce qui permet un processus de conception plus efficace.
Décibel : Unité utilisée pour mesurer le niveau de pression acoustique (intensité d’un son) ou le niveau de puissance d’un signal électrique. Il s’agit d’une unité relative et non absolue, utilisée pour exprimer une variation relative. Le décibel est utilisé pour décrire les sons en termes d’intensité. Pour les sons sous-marins de l’océan, une pression de référence de 1 micropascal (μPa) est utilisée pour décrire les sons en termes de décibels.
Hydrophone : Microphone sous-marin qui peut être déployé individuellement ou en groupe. Les groupes d’hydrophones peuvent être disposés horizontalement sur le fond marin ou verticalement à différentes profondeurs de la colonne d’eau. Les hydrophones détectent les variations de pression dans l’eau causées par les ondes sonores. Ces capteurs convertissent les fluctuations de pression sous-marine en signaux électriques, qui peuvent ensuite être analysés pour déterminer les propriétés du son, comme le volume et la fréquence.
Hélice à pas fixe : Les pales d’une hélice à pas fixe sont réglées à un angle prédéterminé. Les hélices à pas fixe sont à la fois moins chères et plus robustes que les hélices à pas variable. Elles constituent généralement un bon choix pour les navires de haute mer, car le pas de l’hélice peut être réglé à l’angle optimal pour la vitesse de fonctionnement et les conditions de charge souhaitées.
Hélice à pas variable : Une hélice à pas variable peut être efficace pour toute la gamme des vitesses de rotation et des conditions de charge, puisque son pas peut être modifié pour absorber la puissance maximale que le moteur est capable de produire. À pleine charge, un navire aura besoin de plus de puissance de propulsion qu’à vide. En faisant varier les pales de l’hélice au pas optimal, on obtient un meilleur rendement, ce qui permet d’économiser du carburant. Un navire équipé d’une hélice à pas variable peut accélérer plus rapidement à partir d’un point d’arrêt et peut décélérer beaucoup plus efficacement, ce qui rend l’arrêt plus rapide et plus sûr. Une hélice à pas variable peut également améliorer la manœuvrabilité du navire en dirigeant un flux d’eau plus important sur le gouvernail.
- Zhi Cheng, Brendan Smoker, Suraj Kashyap, Giorgio Burella, Rajeev Jaiman (2025). Cavitating wake dynamics and hydroacoustics performance of marine propeller with a nozzle. Physics of Fluids, vol. 37, 015128. ↩︎
- Zhi Cheng, Suraj Kashyap, Brendan Smoker, Giorgio Burella, Rajeev Jaiman (2025). Integrated Numerical and Experimental Study of Cavitating Flow and Underwater Noise in Tug Vessels with Ducted Propellers. Actes de la 44e conférence internationale OMAE (2025) sur les océans, les zones extracôtières et l’ingénierie arctique. ↩︎