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Les navires sont généralement conçus au cas par cas, chacun étant adapté aux différentes exigences opérationnelles du propriétaire ou de l’exploitant. Les différences de conception, de matériaux, de machines et d’autres facteurs peuvent influencer le profil sonore d’un navire. Il n’existe donc pas de solution de conception unique qui permette de réduire le bruit. Pour les exploitants qui cherchent à moderniser leurs navires, le choix d’un seul composant à changer n’est pas nécessairement une décision simple. Le changement d’une hélice, par exemple, peut également inclure le changement d’un groupe motopropulseur et d’autres composants du moteur. Pour modifier le profil sonore d’un navire, il faut comprendre ses besoins opérationnels et les sources de bruit que l’on cherche à réduire ou à éliminer.
Le bruit n’est pas le seul facteur que les exploitants de navires devront probablement tenir compte à l’avenir, étant donné la pression croissante (et la législation) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre des navires. Heureusement, comme le démontre le projet de Vard Marine Inc. : « Ship Energy Efficiency and Underwater Radiated Noise Matrix » (matrice d’efficacité énergétique et de bruit rayonné sous-marin des navires), il existe de nombreuses possibilités de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de bruit simultanément, tout en augmentant l’efficacité énergétique du navire. Présentés à l’Organisation maritime internationale en 2023, ces résultats mettent en évidence des technologies gagnant-gagnant, reconnaissant que l’augmentation de l’efficacité énergétique du navire et la réduction simultanée du bruit rayonné sous-marin augmente la probabilité qu’un exploitant de navire soit prêt à investir dans la technologie dans l’espoir d’obtenir un retour sur cet investissement grâce à la réduction des coûts de carburant.
La matrice d’efficacité énergétique et de bruit rayonné sous-marin des navires examine plusieurs mesures visant à réduire le bruit et les émissions de gaz à effet de serre. Elle résume l’efficacité de chaque mesure, son rendement potentiel, ses avantages et ses inconvénients, son état de préparation technologique, ses facteurs de coût, et indique si elle convient le mieux aux nouvelles constructions ou aux modernisations – ou aux deux à la fois. L’évaluation a révélé que l’efficacité énergétique et le bruit rayonné sous-marin sont souvent étroitement corrélés, l’augmentation de l’efficacité énergétique se traduisant par une diminution du bruit sous-marin des navires. Grâce à ces renseignements, les exploitants de navires peuvent choisir en toute connaissance de cause la direction à prendre. La matrice comprend une centaine de technologies visant à réduire le bruit sous-marin des navires, regroupées sous les thèmes suivants :
- Hydrodynamique : mesures visant à réduire la résistance du navire dans l’eau
- Propulsion : de meilleures hélices
- Alimentation : différentes sources d’énergie, comme les batteries
- Autres technologies : comme l’énergie éolienne
- Planification opérationnelle : réduire la vitesse du navire, adapter les itinéraires aux conditions météorologiques ou éviter les zones d’habitat marin critiques, autant de mesures extrêmement efficaces.

Avec certaines technologies éprouvées et des preuves d’avantages connexes, il est possible de donner la priorité à des conceptions de navires qui augmentent collectivement l’efficacité énergétique et réduisent les émissions de gaz à effet de serre et le bruit rayonné sous-marin. Cette priorisation de la conception doit être à la fois intentionnelle et intégrée afin d’accélérer les progrès vers la décarbonisation et la réduction du bruit des navires.
Dans l’ensemble, le bruit sous-marin des navires est un domaine qui nécessite davantage de recherches pour comprendre comment équilibrer la réduction du bruit avec d’autres priorités, parfois concurrentes, comme l’efficacité énergétique et les émissions de gaz à effet de serre, qui sont toutes les deux plus largement comprises. Il est nécessaire d’accroître la collecte de données et l’échange des connaissances, tant pour l’efficacité énergétique et les émissions de gaz à effet de serre que pour le bruit rayonné sous-marin. Un meilleur échange des connaissances permettra de réduire le risque et l’incertitude pour les armateurs qui cherchent à améliorer le rendement de leurs navires sur plusieurs plans. Sans cela, l’amélioration globale de la flotte mondiale sera encore retardée.
Orientations futures : combler le manque de connaissances sur les effets du bruit
Outre le fait de comprendre exactement comment et pourquoi les navires produisent différents types de bruit, les concepteurs de navires silencieux (et même les autorités de réglementation) sont confrontés à un défi commun : savoir quelle fréquence, quel niveau et quel type de bruit est ou n’est pas acceptable pour la faune et la flore marines.
En Europe, des limites contraignantes pour le bruit sous-marin sont entrées en vigueur en mars 2024. Ces limites, qui tiennent compte des sources de bruit sous-marin à court terme et continu, ont été établies par un groupe de travail technique en 2022. Ces réglementations ont été élaborées sur la base des meilleures connaissances disponibles. Cependant, de nombreuses inconnues subsistent quant à l’incidence du bruit sur la vie marine.
Par exemple, la manière dont les différentes espèces de mammifères marins modifient leur comportement face à différentes sources de bruit, fréquences et périodes de temps, ainsi que les répercussions cumulatives du bruit, en particulier en combinaison avec d’autres facteurs de stress, ne sont pas entièrement comprises.
De même, l’effet du bruit sur d’autres espèces, comme les invertébrés, a reçu moins d’attention que les mammifères marins, mais des études suggèrent que le bruit à basse fréquence peut, par exemple, entraver l’activité de fouissement ou le développement embryonnaire.
D’autres lacunes dans les connaissances concernent l’influence des différentes conditions océanographiques sur le bruit sous-marin. En particulier, nous n’avons pas encore pleinement compris comment les changements climatiques et le réchauffement des océans influenceront le niveau et le comportement du bruit dans l’océan. Cependant, la compréhension de ces changements peut aider à élaborer des solutions « à l’épreuve du temps ».
La recherche sur le bruit sous-marin et son incidence sur la vie marine est une science relativement nouvelle. Ces lacunes dans les connaissances ont également été cernées dans la Stratégie canadienne sur le bruit sous-marin. Les recherches futures façonneront et guideront l’évolution des réglementations et autres mesures visant à réduire le bruit des navires dans les eaux canadiennes et au-delà.
Cet article fait partie d’une série de cinq articles sur la technologie de détection et d’analyse du bruit sous-marin des navires.
Pour en savoir plus sur les nouvelles découvertes et les défis à relever pour rendre les navires plus silencieux, consultez les autres sujets de cette série ici.
L’Initiative pour des navires silencieux est financée par le gouvernement fédéral par l’intermédiaire de Transports Canada. Les partenaires industriels et les chercheurs intéressés par d’éventuelles collaborations en matière de recherche et de développement afin de faire progresser les solutions novatrices dans le domaine de la technologie marine sont invités à contacter l’équipe de l’Initiative pour des navires silencieux à l’adresse suivante : Marine-RDD-maritime@tc.gc.ca.