Les pétroliers sont une présence constante dans les eaux côtières du Canada, mais leur rôle dans le commerce pétrolier de notre pays est souvent mal compris.
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Quelle proportion du pétrole canadien est-elle réellement transportée par voie maritime ? Cet article examine la situation actuelle du trafic de pétroliers le long des côtes canadiennes, en explorant les changements récents concernant les lieux et le nombre de navires qui transitent dans nos eaux. L’ampleur de ce transport et ses nuances pourraient remettre en question les idées reçues.
Le pétrole brut est un terme générique désignant un produit pétrolier non raffiné, qui comprend le pétrole brut conventionnel et le bitume dilué (dilbit), un type de pétrole des sables bitumineux de l’Alberta qui est fluidifié pour le transport. Chaque année, des centaines de pétroliers, des navires conçus pour transporter de grandes quantités de pétrole brut, naviguent dans les eaux canadiennes.
Ce mouvement constant alimente l’inquiétude du public quant au risque de déversement de cargaison. Bien que les réglementations et les normes de sécurité actuelles rendent un tel événement peu probable, un déversement aurait des conséquences environnementales et économiques dévastatrices et durables.
Oléoducs ou pétroliers : un regard sur le commerce du pétrole brut au Canada
Le commerce du pétrole au Canada dépend beaucoup plus des oléoducs que des pétroliers. Bien que les pétroliers soient essentiels pour approvisionner les raffineries en pétrole brut nécessaire à la production de carburants comme l’essence et le diesel, ils ne représentent que 14 % du trafic total de pétrole brut au pays.
En 2024, le Canada a exporté plus de 1,55 milliard de barils de pétrole brut, dont seulement 8 % (130 millions de barils) ont été expédiés par pétrolier. En revanche, les pétroliers ont été essentiels pour les importations, livrant 60 % des 175 millions de barils de pétrole brut importés par le pays.
Les oléoducs et le transport ferroviaire acheminent principalement les exportations de pétrole canadien vers les raffineries des États-Unis. Cependant, les pétroliers jouent un rôle essentiel dans la diversification de notre marché d’exportation vers d’autres destinations internationales. Pour les importations, les pétroliers sont la principale méthode pour acheminer le pétrole brut depuis la côte américaine du golfe du Mexique et d’autres sources mondiales, représentant 57 % de toutes les importations de pétrole brut par voie maritime en 2024.

Une répartition géographique du trafic de pétroliers
Pour comprendre l’ampleur du transport de pétrole brut, Clear Seas a mené une analyse afin d’estimer le nombre de mouvements de pétroliers à des endroits clés sur les côtes canadiennes. Les résultats, basés sur des données commerciales de Statistique Canada, des communiqués de presse et des données de suivi des navires (AIS), révèlent quatre principales zones de concentration :

- Côte Ouest (Vancouver, C.-B.) : Jusqu’à 400 pétroliers visitent chaque année le terminal maritime de Westridge pour exporter du pétrole provenant de l’Alberta via l’oléoduc Trans Mountain, récemment agrandi.
- Québec (Voie maritime du Saint-Laurent, Qc) : On estime à 240 le nombre de transits annuels de pétroliers-navettes qui déplacent le pétrole brut entre une installation de stockage à Montréal et une raffinerie à Lévis.
- Canada atlantique (Saint-Jean, N.-B.) : Environ 115 pétroliers s’y arrêtent annuellement pour importer du pétrole brut de marchés étrangers pour la raffinerie de Saint-Jean.
- Terre-Neuve et Labrador (au large) : Environ 90 pétroliers internationaux se rendent chaque année à l’installation de transbordement de Whiffen Head, T.-N., pour exporter du pétrole provenant des champs pétroliers en haute mer acheminé par des pétroliers-navettes.
Un changement majeur : de l’Atlantique au Pacifique
L’équilibre du trafic de pétroliers au Canada a considérablement changé. En 2020, on estimait que 85 % des mouvements de pétroliers se produisaient sur la côte atlantique, mais ce n’est plus le cas. Aujourd’hui, le trafic est réparti de manière beaucoup plus égale, soit 57 % sur la côte Est et 43 % sur la côte Ouest.
Plusieurs facteurs clés ont contribué à ce changement rapide :
- La fermeture de la raffinerie de Come By Chance, T.-N.-L., en 2020.
- La conversion du terminal pétrolier de Point Tupper, N.-É., pour la production d’énergie verte en 2022.
- L’augmentation de l’activité au terminal maritime de Westridge à Vancouver, à la suite de l’agrandissement de l’oléoduc Trans Mountain en 2024.
- La réduction du trafic de pétroliers internationaux vers les raffineries du Québec, qui reçoivent maintenant plus de pétrole brut par oléoduc jusqu’à Montréal.
D’importants changements ont marqué le trafic de pétroliers dans les eaux canadiennes au cours de la dernière décennie. Alors que les forces économiques mondiales et l’accent mis par le Canada sur la diversification des partenaires commerciaux continuent d’évoluer, on peut s’attendre à d’autres changements dans les années à venir. Bien que les pétroliers ne représentent actuellement qu’une petite fraction du commerce global de pétrole brut du Canada, leur rôle pour assurer que le pétrole atteigne les marchés internationaux demeure vital.