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Au-delà de l’horizon : Le rôle de la technologie dans l’atténuation des risques liés au transport maritimeBeyond the Horizon: Role of Technology in Mitigating Shipping Risk

lecture de 11 minutes
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« Loin des yeux, loin du cœur » est un adage qui ne s’applique pas à la navigation commerciale, dont la technologie permet une navigation sûre, mais qui peut s’appliquer aux navires qui ne sont pas tenus d’être équipés de transpondeurs du système d’identification automatique (AIS), qui signalent la position et l’activité du navire à des récepteurs par satellite ou à terre. Les transpondeurs AIS émettent des « pings » de données à intervalles réguliers, informant les autres navires et les observateurs à terre de la position et de l’état du navire porteur du transpondeur AIS.

Bien que les transpondeurs AIS soient de deux types (classe A et B) et qu’à partir de 2019, ils soient obligatoires pour tous les navires dans les eaux canadiennes certifiés pour le transport de plus de 12 passagers ou d’une longueur de 8 m ou plus et transportant des passagers11, de nombreux petits navires naviguent encore sans AIS. Cette situation expose les navires à un risque plus élevé du point de vue de la sécurité de la navigation et de la recherche et du sauvetage, et signifie également qu’il est plus difficile de suivre et de comprendre l’impact que ces petits navires peuvent avoir sur les écosystèmes océaniques en raison du bruit, du sillage et des déversements potentiels, entre autres impacts.

Afin de comprendre l’impact de ces navires sans AIS, le Forum canadien des risques du transport maritime (FCRTM) a organisé une série de webinaires à partir de septembre 2023 pour réunir des personnes expertes dans divers domaines technologiques afin de partager et de discuter des applications innovantes de ces technologies pour mieux comprendre ce qui se passe au-delà de l’horizon dans les eaux canadiennes.

SESSION 1 : TECHNOLOGIE SATELLITAIRE

Détection des navires « sombres »

Colin Robertson, directeur de la science des données de GSTS, a donné un aperçu de la plateforme de données OcianaTM, et de son rôle dans le regroupement d’ensembles de données pour une meilleure prise de décision concernant le transport maritime, y compris les arrivées « juste à temps » dans les ports et la surveillance des émissions du transport maritime. Grâce à OcianaTM, les scientifiques peuvent suivre les « navires sombres », c’est-à-dire les navires qui sont tenus d’utiliser l’AIS, mais qui l’ont désactivé, ou qui sont devenus « sombres » pendant un certain temps.

La détection s’effectue à l’aide d’une combinaison d’images satellites, de modèles de détection et d’écarts par rapport au comportement attendu (attentes développées à partir d’un suivi au fil du temps). Les navires peuvent devenir « sombres » pour cause de pêche illégale, de cargaison illégale, de violation des sanctions ou des zones marines protégées, ou parce qu’ils sont mis en cale sèche pour des réparations.

Un exemple de pétroliers détectés dans les eaux russes en septembre 2022 a été illustré — des interruptions prolongées dans l’ensemble des données AIS sont un indicateur d’une activité obscure. OcianaTM est un outil qui permet d’accroître l’intelligence maritime.

Aperçu du programme smartWhale et modélisation écologique

Josh van Berkel, responsable des solutions de durabilité — Marine et côtière chez DHI Water & Environment Inc. a donné un aperçu du programme smartWhale développé en collaboration avec l’Agence spatiale canadienne, DHI et WSP pour aider à protéger les baleines noires de l’Atlantique Nord (NARW), une espèce en voie de disparition, des collisions avec les navires. L’utilisation de la modélisation hydrodynamique des zones d’habitat océanique pour générer des zones d’habitat appropriées spatialement et temporellement explicites permettra de mettre en place un système d’aide à la décision qui incorpore les emplacements connus des navires et les zones probables de risque accru de collision avec les baleines noires de l’Atlantique Nord.

Résultats des risques de collision de smartWhale Hindcast

SESSION 2 : TECHNOLOGIE AÉRIENNE

Collecte de données sur les navires sans AIS à l’aide de relevés aériens

Norma Serra, analyste environnementale pour Transports Canada et Jorge Quijano, scientifique de projet pour JASCO, ont fait équipe pour décrire l’utilisation des capteurs montés sur les avions du Programme national de surveillance aérienne de Transports Canada, afin de recueillir des informations sur les navires sans AIS, puis d’appliquer cette imagerie pour développer des évaluations du bruit sous-marin dans la région du Pacifique. En se basant uniquement sur les informations de l’AIS, on obtient une compréhension incomplète des risques et des menaces réels liés aux navires.

Les études ont montré qu’il y avait beaucoup plus de navires sans AIS le long de la côte pacifique du Canada, qu’il s’agisse de navires de pêche ou de plaisance, et qu’ils étaient plus nombreux pendant les mois d’été. Les résultats suggèrent que le trafic sans AIS contribue de manière significative au bruit sous-marin dans la région, en particulier pendant les mois d’été, lorsque les baleines sont plus susceptibles d’être présentes.

Un avion du PNAS et les équipements pour les relevés aériens

Contrôle de l’efficacité des zones de protection marine au moyen de la détection aérienne et de la détection des navires par RADARSAT-2

Lily Burke, biologiste de recherche à Pêches et Océans Canada (MPO), a décrit l’utilisation de RADARSAT et de données d’enquêtes aériennes (provenant du PNAS et des enquêtes des pêcheurs du MPO) pour évaluer les activités de pêche dans les zones de protection marine (ZPM). Avec une expansion significative des ZPM depuis 2015, le MPO a besoin d’outils de surveillance pour s’assurer que les ZPM atteignent leurs objectifs et que les réglementations visant à protéger les ZPM sont efficaces, en surveillant le comportement humain.

Drones d’inspection portuaire autonomes et conscients des risques (RAPID)

Gerard Dooly, professeur associé à l’Université de Limerick en Irlande, a présenté le projet RAPID, financé par l’Union européenne, qui combine et étend la technologie des drones pour fournir un service d’inspection de maintenance entièrement automatisé et sécurisé pour les ponts, les inspections de la coque des navires, et bien plus encore. Plus précisément, le service combinera des véhicules de surface autonome à voile et des systèmes aériens autonomes.

L’objectif est de réduire le temps et le coût de la surveillance de l’état structurel des infrastructures de transport maritime telles que les équipements de manutention, les navires de marchandises et de passagers et les ponts. Le nouveau système RAPID facilitera également la hiérarchisation des infrastructures de transport plus sûres.

SESSION 3 : TECHNOLOGIE À TERRE

Surveillance du trafic de petits navires à l’aide de caméras de surveillance de la faune pour soutenir la planification et la gestion du milieu marin à Haida Gwaii

Kil Hltaanuwaay Tayler Brown, planificateur de l’espace marin pour le programme de planification marine du Conseil de la Nation haïda (CNH), a été rejoint par Kelly Larkin, gestionnaire du Programme de sensibilisation accrue aux activités maritimes (PSAAM) de Transports Canada, et Yury Bychkov, développeur et bioanalyste informatique pour LGL Limited, pour partager les résultats d’un projet visant à surveiller le trafic des petits navires près de Haida Gwaii. En 2021, le CNH, en collaboration avec LGL Limited, a conçu et mis en œuvre un projet pilote visant à surveiller 18 zones littorales entre mai et septembre à l’aide de caméras pour la faune (un boîtier autonome avec des batteries et un panneau solaire) et de la plateforme de l’EMSA.

En utilisant YOLOv5 pour traiter 5,5 millions de photos, près de 35 000 images ont été identifiées avec des bateaux. Les emplacements ont ensuite été évalués avec l’EMSA pour comprendre la proportion du trafic maritime avec et sans transpondeur AIS. Un autre objectif de ce projet était de fournir des données sur les navires sans AIS afin de mieux comprendre l’impact du bruit des petits navires dans la région.

Caméra à terre et photographie d’une petite embarcation

Marine Monitor (M2) Installation à terre

Samantha Cope, scientifique principale de Protected Seas, a donné un aperçu du système M2, une plateforme de surveillance à terre qui intègre un radar marin en bande X, un capteur AIS et des caméras optiques avec un logiciel personnalisé pour suivre de manière autonome l’activité des navires de tous types et en faire rapport. L’installation du système M2 sur l’île de San Juan, surplombant le détroit de Haro dans la mer des Salish, en partenariat avec Beam Reach et Orca Sound, a démontré comment le système M2 est utilisé pour soutenir la sécurité maritime et surveiller de manière indépendante l’activité des navires. Protected Seas a reconnu un besoin évident de surveiller les navires sans AIS, en particulier dans les zones marines protégées. M2 peut identifier des navires individuels dans un rayon de 1 mille nautique, le type de navire dans un rayon de 3 milles nautiques et la présence d’un navire dans un rayon de 5 milles nautiques de l’installation.

Comparaison des observations de navires à l’aide du M2 dans la mer des Salish

SESSION 4 : TECHNOLOGIE SUR L’EAU

Utilisation de navires autonomes pour l’observation, la surveillance et la sécurité maritimes

Fritz Stahr, directeur de la technologie chez Open Ocean Robotics, a décrit comment la technologie des navires autonomes à énergie solaire peut être utilisée pour collecter et communiquer des données océaniques afin de lutter contre les activités de pêche illégales, de détecter la pollution, de réduire les gaz à effet de serre provenant du transport maritime et de comprendre les changements climatiques dans l’environnement océanique, avec de nombreuses applications potentielles permettant d’accroître la sécurité maritime et la durabilité.

Application de renseignements côtiers en temps réel pour quantifier les risques marins et optimiser la prise de décisions

Scott Beatty, PDG de Marine Labs, a donné un aperçu de la plateforme CoastAwareTM et de différentes sources de données permettant de fournir des informations historiques et en temps réel pour une prise de décision éclairée. Les sources de données comprennent l’installation de capteurs sur des bouées pour recueillir des données sur le vent et les vagues. Ces informations permettent à Marine Labs de détecter le sillage des navires qui passent dans les zones protégées. De meilleures informations sur les conditions de vent et de vagues peuvent favoriser une navigation plus sûre en aidant les marins à prendre de meilleures décisions concernant leur environnement opérationnel. Marine Labs vient également de lancer BerthWatch, un système inédit de surveillance et de signalement en temps réel de la profondeur des postes d’amarrage, afin d’optimiser l’accostage et le chargement des navires.

CoastAwareTM recueillant des données sur l’état des vagues

L’utilisation de véhicules télécommandés (ROV) pour renforcer la sécurité et l’efficacité opérationnelle dans le transport maritime

Brayden Gibson-Wray, directeur des ventes techniques et de la formation chez SEAMOR Marine Ltd a expliqué comment les ROV peuvent être déployés pour étudier les conditions sous-marines, y compris les dangers pour la navigation, les épaves ou les infrastructures telles que les terminaux maritimes ou les câbles et pipelines sous-marins, jusqu’à une profondeur de 600 m. Les ROV sont équipés de caméras, de sonars, d’éclairages, d’altimètres et de jauges d’épaisseur à ultrasons pour comprendre la corrosion dans l’environnement sous-marin. Cette technologie est également utile pour localiser et récupérer les engins de pêche fantômes dans l’environnement marin.

SESSION 5 : COLLECTE ET APPLICATION DES DONNÉES

Développement du Système intégré d’observation des océans du Canada (SIOOC)

Jonathan Kellogg, coordonnateur des communications scientifiques à l’Institut Hakai, a présenté le Système intégré d’observation des océans du Canada (SIOOC). Le SIOOC est une collaboration avec des partenaires d’un océan à l’autre qui rassemble toutes les données océaniques du Canada sur une plateforme en ligne afin de permettre aux personnes intéressées par les données océaniques de trouver, d’accéder et de réutiliser plus facilement les observations pour améliorer la prise de décision en fonction du lieu.

Anne-Sophie Ste-Marie, codirectrice par intérim de l’Observatoire global du Saint-Laurent, a présenté un outil en cours de développement lié aux activités de transport maritime et de navigation de plaisance au Canada, qui permet aux navigateurs de visualiser les conditions marines dans la région du Saint-Laurent pour une navigation plus sûre. L’objectif du SIOOC est de développer des outils d’information qui répondent aux besoins des personnes utilisatrices.

SESSION 6 : TECHNOLOGIE D’IMAGERIE THERMIQUE

Détection des baleines à l’aide de capteurs thermiques terrestres et maritimes d’un océan à l’autre

Daniel Zitterbart, scientifique associé, spécialiste de la physique et de l’ingénierie appliquées aux océans pour Woods Hole Oceanographic Institution, a fait part de ses travaux dans le laboratoire de télédétection des animaux marins (MARS) pour permettre une détection avancée des baleines. En utilisant des méthodes de télédétection telles que la photographie, les satellites, les radars et la surveillance acoustique passive, les navires équipés d’une caméra thermique peuvent détecter les jaillissements de baleines à une distance comprise entre 2 et 13 km, en fonction des conditions météorologiques.

La technologie de l’imagerie thermique permet une détection de nuit et même dans un léger brouillard. Plus les navires sont informés tôt de la présence d’une baleine, plus ils sont susceptibles de ralentir ou de manœuvrer pour éviter de la heurter. Cette technologie a été testée en Colombie-Britannique et dans le Canada atlantique, avec des installations à terre (7) et à bord de navires (3) jusqu’à présent. Le système fait appel à un scientifique pour vérifier les données et confirmer l’identification positive des baleines. Les espèces de baleines peuvent être identifiées à l’aide des données des caméras couleur en plein jour, mais les baleines noires de l’Atlantique Nord sont les plus difficiles à identifier avec certitude, car elles sont peu nombreuses, restent au ras de l’eau et présentent peu de caractéristiques distinctives (pas de grande nageoire dorsale comme les épaulards). Les modèles de détection sont également entraînés à voir les petits icebergs dans l’eau.

L’imagerie thermique au service de la détection des baleines

Cette série de webinaires continuera à partager les nouveaux développements technologiques et la façon dont ils sont appliqués pour créer un environnement maritime plus sûr.

Rejoignez le FCRTM pour recevoir les informations sur les événements à venir.

  1. https://tc.canada.ca/en/marine-transportation/marine-safety/ship-safety-bulletins/expanding-ais-requirements-ssb-no-09-2019 ↩︎
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